19 juin 2011
Une buse
Le ciel avançait vite. Une buse planait, goûtant les caresses des nuages. Elle se laissait porter entre le monde stratosphérique et la citadelle de béton. Elle pouvait voir, comme un damier, les attiques, les penthouses, les jardins suspendus, les balcons à ciel ouvert. Elle surprenait des petits déjeuners encore endormis, de vieux humains actionnant de petits ciseaux contre des murs de lierre, des créatures filiformes en compagnie de fruits frais découpés, des corps allongés et tournés vers le soleil, des peaux très proches. Elle constatait ainsi le silence très éphémère qui se développe entre la nuit et le jour, les gestes démesurés qui accompagnent l'organisation des espaces, l'intimité des régimes et des restrictions, la petite musique chiffonnée des épidermes qui se flétrissent, la transmission des mycoses et des maladies. Au-dessus des attiques, des penthouses, des jardins suspendus, des balcons à ciel ouvert, une buse assistait à l'humanité.